Partir pour mieux revenir

PAUL SMITH

Hier, j’assistais avec grand bonheur à la soirée d’information pour mon voyage qui me mènera, après environ 300 kilomètres de marche, à Saint-Jacques-de-Compostelle. Deux habituées des chemins et passionnées par leurs périples nous ont partagé leur expérience et transmis cette envie de partir à la découverte de soi dans une aventure hors du commun.

Il y a trois volets à ce type de voyage. Tout d’abord, l’aspect sportif ou physique de la chose. Car oui, c’est de la marche, mais c’est de la marche à tous les jours, avec un sac-à-dos chargé et un terrain variable. Le défi n’est pas tant cardiaque que pour les muscles et les pauvres pieds qui subiront nombre d’ampoules. Moi qui a une peau ultra fragile, je sais déjà que ce sera un des éléments qui m’irritera. Mais quand on s’y prépare, psychologiquement, on peut y faire face, comme tout le reste.

Il y a bien entendu aussi l’aspect social, car sur ces chemins, plus de trois millions de visiteurs convergent vers la ville de Saint-Jacques-de-Compostelle à chaque année. Donc autant dire que, même si certains moments se vivent dans la solitude, il y a toujours un pèlerin pas loin… Selon l’état du moment ainsi que selon le niveau et la qualité de sommeil des derniers jours, la faculté sociale peut être variable. Mais des rencontres marquantes et touchantes peuvent se vivre au quotidien.

L’aspect inévitable de cette expérience est sans aucun doute au niveau spirituel. Bien qu’à l’origine ce périple était très lié à la religion catholique, aujourd’hui, on parle plus de spiritualité. Puisque marcher pendant des jours, dans des lieux foulés par tant de gens et voir tant de paysages, faire cet effort physique exigeant, parfois accompagné de souffrance, parfois accompagné d’une certaine fatigue, ça casse un égo comme on dit.

C’est cette découverte de soi qui m’attire le plus dans ce voyage. Aller à la rencontre de mes failles, de mes limites et les accepter, trouver la force quand je crois que plus rien n’est possible, trouver en moi la confiance en mes capacités et apaiser les tensions et soigner les blessures de l’âme que j’ai pu accumuler au fil de ma vie.

Je sais pertinemment qu’au moment où je m’en attendrai le moins, je risque de « casser », de m’effondrer. Je le sais déjà et j’accepte ce fait. Je ne partirai pas faire une performance, je partirai pour mieux revenir, tout simplement. J’ai la nette impression que, tout comme Nicole qui est une grande adepte quasi annuelle de ces chemins, j’aurai un coup de cœur, un coup de foudre pour ces lieux mythiques, et que j’aurai envie d’y retourner, malgré les difficultés.

Parce que ça me rejoint, parce que j’ai toujours aimé la randonnée, parce que j’aime avancer à mon propre rythme, parce que les lieux religieux, même si je vais rarement à l’église, me procurent une paix intérieure inégalée. Et parce que j’ai envie de nourrir mon âme de ces expériences enrichissantes. Je le sais, je le sens. J’ai rarement été aussi convaincue d’un de mes choix dans la vie.

Je trépigne à l’idée de partir et c’est pourtant dans plus de quatre mois. J’aurai à patienter, à me préparer, à m’entraîner en conséquence. Tout ce chemin qui me mènera sur les chemins, ça fait aussi partie de l’aventure. Choisir chaque item qui trouvera sa place dans mon sac, prévoir le mieux possible mais aussi lâcher-prise puisque tout ne peut pas être considéré à l’avance. Il faut aussi laisser place à la spontanéité et aux surprises qui se présenteront.

Quand on fait de bons choix dans la vie, on le ressent, au plus profond de soi-même. Et je sais pertinemment que cette décision de m’embarquer dans cette excursion m’amènera là où je dois être, me fera rencontrer des gens qui m’apporteront beaucoup et que j’apprendrai sur moi plus que jamais. Il ne reste qu’à attendre le grand départ!

 

Photo : Unsplash | PAUL SMITH