Ces derniers temps, j’ai l’impression d’avoir coulé mes fondations, d’avoir délaissé ma maison mobile et d’avoir enraciné ma structure, solidement et patiemment. D’avoir travaillé suffisamment fort sur moi pour que ma base soit en place pour un bout de temps, qu’elle résiste mieux aux tempêtes et me permette de construire ma vie, pièce après pièce, un étage à la fois.
J’ai longtemps sentie ma base « chambranlante », toujours à l’affût de la moindre tempête qui allait arracher des morceaux, laisser des traces de son passage sur mon être fragile, disloquer mon équilibre.
Mais heureusement, quand on travaille sur soi et qu’on avance, contre vents et marées, qu’on s’acharne à se comprendre et se connaître, qu’on donne le temps au temps… On finit par récolter le fruit de notre labeur et s’enraciner.
Connaître nos défauts, nos limites, nos qualités et nos atouts… Ces éléments essentiels à toute fondation durable. C’est comme le mortier, ça soude les éléments ensemble. Et ça sert de repère quand on se sent partir à la dérive, d’ancre pour nous garder attachée au port.
Pendant des années, l’anxiété m’a empêchée de me sentir moi-même, m’enfermait sous une carapace dure et inébranlable alors qu’à l’intérieur le séisme rugissait. Et quand je croyais avoir trouvé une bouée, elle me glissait des mains et je replongeais. Un perpétuel tourbillon que je ne comprenais pas et qui me remuais les « trippes », à m’en rendre malade parfois.
Et je ne comprenais pas que le réel sauvetage viendrait de l’intérieur. Je ne voyais pas qu’à force de semer petit à petit les graines de mon estime, un jour je me sentirais épanouie.
J’ai lu beaucoup, consulté une psy et même vu un voyant. Chaque rencontre, chaque lecture a laissé inconsciemment des traces, a ajouté sa part à ma fondation. Au fur et à mesure les morceaux ont fini par se souder ensemble et sans que je m’en aperçoive, la base était bien là, solide, définie et ancrée. C’est en levant la tête qu’on constate le chemin parcouru, en regardant derrière, devant et dedans…
Être capable d’écrire tout cela aujourd’hui est une étape, un accomplissement, un carrefour. La route continue et je sais pertinemment que certains bouts seront comme un chemin de terre mais j’ai appris que ces épisodes sont nécessaires et surviennent pour nous apprendre quelque chose. Si la route était tjrs belle, comment grandirions-nous? Je dis souvent que ça prend des moments plus durs pour apprécier les tendres. Si la route était toujours lisse et sans encombre, comment pourrais-je continuer d’évoluer, de me solidifier? C’est en se confrontant à des moments plus durs qu’on peut constater la beauté de notre force. Quand tout va bien, on a tendance à prendre pour acquis ce que l’on a, on a l’impression que rien ne peut nous atteindre. Puis un matin, une petite épreuve se met sur notre route pour nous rappeler que ce n’est jamais fini et qu’on doit perpétuellement tenter de s’améliorer.
Avant, quand ça n’allait pas, je bougeais, je déménageais littéralement… Comme si changer l’environnement extérieur allait balayer les soucis, comme si j’allais jouer un tour à la vie. Mais j’ai compris que c’est elle qui mène le bal et que de m’épuiser à tenter de lui jeter de la poudre aux yeux ne faisait que me drainer moi-même, m’anesthésier en quelque sorte au lieu de ressentir.
Alors aujourd’hui, je commence ma journée en écrivant sur ce blogue pour toujours ressentir, le bon comme le mauvais. Et ça me rappelle que j’ai parcouru un bon bout de chemin. Et que même quand ça va mal, quand je me sens dans le brouillard… Je sens. Et c’est beaucoup mieux que de fuir.
Photo : Unsplash | Mathieu Turle