Durant la fin de semaine, j’ai décidé de regarder en rafale la série documentaire Naufragés des villes, diffusée sur TOU.TV et réalisée par Radio-Canada et TFO. Déboulonner les mythes de la pauvreté, voilà la mission que s’est donné l’équipe de production de cette série réaliste et poignante qui mélange les topos sur des organismes communautaires à l’immersion totale de deux volontaires qui ont choisis de vivre l’expérience complète.
En effet, pendant deux mois, Pierre et Emmanuelle ont vécu la réalité des gens vivant de l’aide sociale, avec un maigre 592.08$ dans leur poche pour le mois. Ils ont été amenés à Montréal, ville qu’ils connaissaient peu et devaient se débrouiller, comme auraient dû le faire de vraies personnes dans le besoin. Trouver un toit, de la nourriture, du travail avec un CV troué et maigre d’expérience, voilà ce qui constituait le quotidien de nos deux courageux participants.
Ça aurait pu être exagéré, larmoyant ou condescendant mais c’est plutôt empreint de réalisme et d’humilité. Je n’avais jamais entendu parler de ce documentaire découlé en 10 épisodes qui a été tourné en 2010. La formule d’un artiste par épisode qui décrit la vie de Pierre et Emmanuelle, la qualifie en tant qu’observateur, est réellement intéressante. Choisis minutieusement, ces 10 intervenants ont un regard compatissant et on sent qu’ils ont vécus eux aussi des périodes difficiles ou ont été confrontés à des situations où des gens dans le besoin nécessitait une aide urgente.
De la banque alimentaire aux refuges, en passant par les bons-repas et les petits boulots incertains, tout est abordé et on comprend rapidement le cercle vicieux de la pauvreté et de l’itinérance. Voir ces 2 personnes habituées à vivre une vie relativement aisée être confrontées à cette dure réalité est réellement un choc. Nos petits bobos, nos petits soucis nous paraissent si anodins et on ne peut s’empêcher de se trouver égoïste de ne pas en faire plus pour notre communauté.
On comprend aussi que ça peut arriver à tout le monde de vivre une période de précarité et des témoignages touchants viennent nous le rappeler et appuyer cette constatation. Des gens qui se sont fait flouer, des maladies mentales, des abus, des deuils… Plusieurs situations peuvent survenir et faire en sorte qu’une personne tombe dans la souffrance et dans l’impossibilité de subvenir à ses besoins et ceux de sa famille.
Le tissu social, troué par toutes les coupures gouvernementales, tient de peine et de misère. On comprend assez vite que c’est le temps bénévole, l’implication de certains artistes, le don de soi de gens qui ont peu mais qui le partage qui tient en place et assure une survie à tout ce système d’entraide qu’est le communautaire.
J’ai été profondément bouleversée de voir tous les préjugés entretenus sur cette sphère de la communauté qui ne demande qu’à reprendre le chemin du travail et de la vie participative. S’il y a un message qui est répété et qui devrait être compris de tous, c’est que l’isolement et la solitude sont les deux plus grands maux de la pauvreté. Ce n’est pas tant le montant du chèque que le fait d’être seul et de se sentir inutile.
Si on se conscientise mieux à cette perspective, on aura peut-être un autre regard sur ces gens et on sera peut-être plus enclin à ouvrir notre cœur. C’est ce que je nous souhaite en tant que société et surtout en tant qu’humain.
Photo : Eye On Canada