Mon pays, c’est l’hiver

Brigitte Tohm

C’est drôle l’effet que la neige peut avoir sur nous, particulièrement au mois de mars, à quelques jours de l’arrivée du printemps. Beaucoup ramènent sur le tapis la tempête du siècle de 1971 en jouant au jeu des comparaisons. Je ne veux pas briser votre rêve, mais on est loin, du moins à Montréal, de battre les records de l’époque. Mais bon, on demeure les champions des discussions météorologiques…

Je suis heureuse de constater que la majorité des écoles sont fermées aujourd’hui, rendant les routes beaucoup plus prudentes et obligeant nombre de parents à demeurer à la maison. On s’entend qu’une journée comme aujourd’hui, ce n’est pas nécessaire ni prudent de trimbaler la marmaille sur les routes enneigées et glacées.

Dans ma tête, c’est le genre de journée pour rester en pyjama, à écouter des dessins animés, manger des crêpes et faire des biscuits maison. Le bricolage, les bonhommes de neige font partie des activités de prédilection pour s’amuser et éviter de tomber dans la déprime de l’hiver qui s’éternise.

Je ne peux m’empêcher de penser que Dame nature nous chicane et nous envoie des messages clairs sur le traitement qu’on lui réserve. On la maltraite, on la pollue, on bafoue ses droits alors il ne faut pas se surprendre qu’elle reprenne le contrôle et nous punisse ainsi. C’est sa façon de nous dire qu’elle n’est ni éternelle, ni invincible, tout comme nous.

Notre climat forge notre caractère, influence nos habitudes de vie, nos réflexes et notre rythme. Ce matin, la lenteur ambiante démontrait notre résilience et notre lâcher-prise face à ces embûches. Obliger les gens à prendre congé, à travailler de la maison, à s’organiser, c’est les forcer à changer leur plan de la journée, brasser la cage du monde pour rappeler que malgré toutes les planifications possibles, il arrive que la vie nous réserve des surprises et que l’on doive s’ajuster.

S’il y a bien une chose que l’on ne contrôle pas, c’est évidemment notre climat hivernal. Mais on a souvent trop tendance à gérer notre horaire comme si c’était immuable, inaltérable. Et pourtant, on doit accepter les imprévus, les changements de dernière minute, les bouleversements… Ça exige de pouvoir gérer ces perturbations. Et tous ne sont pas égaux dans cette capacité.

J’aime bien malgré tout cet effet d’électrochoc que procure les tempêtes, nous obligeant à tout arrêter, à revoir nos priorités, à vivre un peu de confusion, à affirmer notre solidarité et faire preuve d’entraide. On le dit souvent mais c’est dans de tels moments qu’on apprend à connaître nos voisins, qu’on entre en contact avec des inconnus dans le besoin. On n’a qu’à penser à ceux qui ont passé la nuit sur la 13 et qui ont dû se soutenir.

Le printemps viendra malgré tout balayer toute cette neige, amenant avec lui les chauds rayons du soleil, les bourgeons aux arbres et tous les signes que la vie s’agite autour de nous. Et je peux vous promettre que dans 2 mois, on ne pensera plus à ce dur passage qui aura généré maux de dos, réclamations d’assurance et autres désagréments.

Un verre à la main, sur une terrasse ou dans votre cour, vous fêterai le retour du temps doux, de la verdure et de la légèreté qui revient inévitablement. Chaque année, on a l’impression que ça ne finit plus, qu’on n’arrivera jamais à l’été, que c’est pire que les autres années. Et on survit toujours, on oublie même les déplaisirs et tribulations, fondant dans notre esprit en même temps que la neige.

Bientôt, je vous promets, on sera en manche courte dehors, les deux mains dans la terre à manipuler nos jardins ou dépoussiérant notre BBQ. Et on sera heureux!

 

Photo : Unsplash | Brigitte Tohm