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Sois belle mais surtout, ne fais pas de vague…

Greg Raines

Combien de fois ai-je ressenti, de la part de collègues, de patrons ou de connaissances cette attitude misogyne qui consiste à mettre une femme de côté ou à lui assigner un rôle moindre, ingrat ou sexiste ? Des centaines… En fait, je n’avais pas tant porté attention à cela puisque c’est tellement inscrit dans la société qu’on finit, parfois, même en tant que femme, par le banaliser. Je ne dirais pas l’accepter car il y a des limites à l’innocence quand même. Mais garder le silence alors qu’on bouille intérieurement, je suis convaincue que toutes les femmes qui liront ce billet sauront pertinemment de quoi je parle.

De la blague de mauvais goût en passant par une assignation de projet en fonction du sexe de la personne, j’en ai vu, et vous aussi, de toutes les couleurs. J’ai aussi souvent entendu des commentaires du genre : on ne lui donnera pas tel truc, elle va surement partir en congé de maternité sous peu… Ou même de voir des gestionnaires me demander, en entrevue, en toute illégalité, si je prévoyais avoir des enfants dans les prochaines années.

Ceci est sans compter les demandes concernant la tenue vestimentaire, incluant les talons hauts, pour régler un dossier (lire ici, faire baver un client car on sait que l’entreprise a failli à son devoir et la pilule sera moins dure à faire passer s’il y a une « pitoune » dans la place). Ou de me faire carrément dire par un recruteur que si je veux le mandat facilement, en mettant un décolleté plongeant, c’est dans la poche (désolée pour le jeu de mots).

Bref, en tant que femme, on en voit de toute sorte, sans grande subtilité et bien souvent, sans même que la personne en question ne réalise que c’est malsain et dégradant. Mais, au-delà des mots, il y a aussi l’attitude. Sentir que la femme dans la salle dérange car on ne peut pas faire de blagues salaces, avoir l’impression qu’on nous prend pour une conne, ressentir une jalousie car on croit que notre succès est dû à notre paire de seins, c’est extrêmement frustrant.

Quand une femme hausse le ton, on la traite encore d’hystérique alors que du côté masculin, ça passe pour une force de caractère. Il sait se faire respecter, dit-on ! Alors que la femme se fait dire de se calmer… Et celle qui me dérange particulièrement est de me faire dire, parce que j’ai de la drive, que j’ai un fort côté masculin. Comme si l’audace et la capacité d’argumenter étaient systématiquement réservées au niveau de testostérone.

Ne pas faire de vague, rester dans l’ombre pour supporter nos collègues mâles et les regarder ramasser les lauriers de notre travail acharné, c’est vraiment ça que vous jugez être équitable ? Il me semble qu’il est clair que les femmes apportent à la société autant de bénéfices que leurs pendants masculins. Mais, ça m’attriste de devoir le dire encore, malheureusement, ce n’est pas assumé ni défendu par tous.

Alors mesdames, et messieurs, quand vous ressentez une inégalité, constatez un comportement inadéquat ou vivez une situation dérangeante, de grâce, dénoncez, affirmez-vous et soutenez ceux et celles qui en sont victimes. C’est à force de marteler le message et de s’unir contre les injustices qu’on finit par faire changer les choses. Pas en attendant que le train passe… Peu importe votre rôle, votre occupation, vous méritez votre place autant que tout le monde.

Chaque personne apporte de la valeur dans la société, comme une pièce de domino. Quand on en retire, le jeu ne tient plus, n’a plus la même force, la même pertinence. Tout le monde est en droit de se faire respecter et c’est de notre responsabilité de s’en assurer, tous ensemble.

 

Photo : Unsplash | Greg Raines

Cette réalité migratoire

chuttersnap

Ce matin, en faisant défiler les écrans de La Presse+ devant mes yeux tout en buvant mon café, j’ai été littéralement happée par un titre dans les critiques de cinéma : Human Flow. Il s’agit d’un documentaire-fleuve de l’artiste chinois Ai Weiwei qui nous présente de façon réaliste le portrait des migrants, forcés de quitter leur terre et parfois se promenant de camps en camps, n’ayant plus d’attache ni de citoyenneté dans certains cas.

Bien que la critique révèle un manque de ligne directrice claire dans le récit, les images sont troublantes et déchirantes. C’est venu me chercher directement au cœur et ça m’a viré à l’envers. Dans notre petit confort nord-américain, on ne soupçonne pas toujours ce qui se déroule à l’autre bout du monde, cette souffrance silencieuse qui gâche des vies, qui tuent des gens. Des témoignages criants de vérité nous exposent à la détresse de millions de gens délaissés, abandonnés à leur sort et dont on ne parle que trop peu.

Filmé dans 23 pays, ce documentaire choc nous conscientise sur ce phénomène mais nous fait sentir aussi extrêmement impuissants, assis dans nos belles maisons confortables (et chauffées). Que faire dans un tel contexte? N’est-ce pas un droit humain de base que de se sentir chez-soi quelque part, de pouvoir se déposer et construire sa vie? Voir tous ces enfants qui grandissent sans espoir et sans racines, ça m’a vraiment bouleversée.

Les paroles d’une jeune femme résonnent encore dans mon esprit :

Nobody has shown us the way.
Where am I supposed to start my new life?

Que répondre à cela? Peut-on seulement lui promettre, collectivement, qu’elle pourra refaire sa vie? Sans papier, sans refuge, sans plan, sans même l’ombre d’une résolution de conflit, que peut-elle espérer?

Vous me trouverez peut-être déprimante ce matin mais parfois, il faut faire face à l’horreur du monde qui se déroule et cesser de se défiler. C’est facile de fuir cette évidence et de continuer notre vie sans y penser. Après tout, c’est si loin de nous. Mais la réalité, c’est que tout le monde peut un jour se retrouver dans une telle situation, même si ça peut sembler inimaginable. Et surtout, on est tous responsables du sort de l’humanité, ce n’est pas que l’affaire des dirigeants de ces quelques pays, ce n’est pas uniquement parce qu’ils ont fait des erreurs dans leur gestion, ce n’est pas détaché de nous.

C’est par nos choix, nos achats, nos décisions qu’on influence le sort de plusieurs sociétés et on doit, au minimum reconnaître ce qui se cache derrière les facettes moins luxuriantes du monde. Une prise de conscience collective aura déjà pour effet qu’on se questionnera un peu plus, qu’on s’informera davantage. Comme on dit souvent, chaque petit pas compte et je demeure une éternelle optimiste quant aux possibilités et à la force que nous pouvons avoir, tous ensemble.

Le film est présenté dans plusieurs salles à travers la province et, malgré que je ne sois pas une grande adepte des cinémas, je compte bien faire exception pour aller m’exposer à cette réalité sur grand écran. Comme si l’ampleur de la souffrance méritait que j’en aie plein la vue, comme si chacun des malheureux déplacés me conviaient à un rendez-vous intime pour me montrer ce que je ne vois pas dans ma réalité de privilégiée.

Si cela vous intéresse, vous trouverez l’horaire ici :
http://mediafilm.ca/fr/horaire_film/index.sn?code=44879413052972771

 

Photo : Unsplash | chuttersnap

Quand le pouvoir rend fou

MARK ADRIANE

Ce matin, difficile de ne pas en parler, de ne pas y penser, de l’éviter : le sujet est partout. Les agressions sont dénoncées, les victimes lèvent le voile sur leur secret trop longtemps gardé, la masse est troublante et dérangeante. Mais tout ce brouhaha est nécessaire, utile, salvateur, formateur. Car pour comprendre pourquoi ça perdure, il faut savoir, il faut nommer, il faut oser dénoncer.

J’ai lu des commentaires de toute sorte sur les réseaux sociaux et certains se plaignent du traitement violent que subissent messieurs Salvail et Rozon, sachant que beaucoup d’agresseurs moins connus sévissent en coulisse. Oui, c’est vrai qu’il n’y a pas qu’eux mais quand on se place dans une position de pouvoir aussi intense, quand on se pavane sur la place publique sans gêne en se croyant invincible, quand on se vante d’être au sommet, on dégringole sous les yeux de tous.

Tout agresseur se vaut en ce sens qu’il devrait être dénoncé et puni mais c’est parfois grâce aux histoires plus médiatisées que les victimes de l’ombre vont oser parler. C’est un mal nécessaire cette souffrance collective, ce choc brutal, cette prise de conscience monumentale. Non, ce n’est pas anodin, non ce n’est pas rare, non ce n’est pas exceptionnel. C’est courant, c’est vicieux et c’est présent dans tous les milieux.

Certains hommes déjà assoiffés de contrôle et de reconnaissance se retrouvent en position de pouvoir et perdent le contact avec la réalité, avec la loi, avec les limites de l’acceptable. Le pouvoir et l’argent, ça monte à la tête… Tous les dirigeants ou hommes en position de leadership ne sont pas des agresseurs, attention. Mais si, à la base, il y a un trouble, il risque d’être amplifié avec la position occupée.

Et c’est le cas des femmes aussi, ne l’oublions pas. L’horreur n’est pas réservée aux hommes, au contraire. Des abus de pouvoir, des dépassements de bornes, des comportements inadéquats, il y en a à tous les niveaux, chez tous les humains. Parce que, le dérapage peut survenir chez chaque être humain, qu’on se le dise. Si vous croyez être protégé de cela, être au-dessus de la mêlée, je vous invite à faire un petit examen de conscience. On a tous des choses à se reprocher…

Ne pas venir en aide à quelqu’un qui se fait agresser sous nos yeux, dans le métro, au travail ou ailleurs, c’est aussi participer à cette culture du viol. Cette expression que beaucoup détestent parce qu’elle fait mal et rend honteux est bel et bien pertinente dans notre société. Ce n’est pas que la personne qui se fait mettre la main aux fesses qui la vit, c’est tout le monde autour qui se tait et endure.

Collectivement, on doit se poser des questions, ensemble, on doit décider de changer et de faire cesser ce silence malaisant. Car c’est ensemble que nous sommes plus forts, c’est à plusieurs qu’on peut se défendre, s’affirmer haut et fort et avoir le poids nécessaire pour que l’ignorance cesse.

Certaines femmes connues dénoncent ce matin les comportements inadéquats qu’elles ont subis, témoignent du profond inconfort qui se vit. Mais chaque femme n’a pas le micro ou la plume pour le faire. Et l’éclat, le grand tourment ne doit pas tomber dans l’oubli. On doit poursuivre le combat et ne pas baisser les bras. On doit réfléchir à nos normes sociales, à ce qu’on se souhaite comme climat de vie. Non, c’est non. Mais au-delà de ça, il y a quoi?

 

Photo : Unsplash | MARK ADRIANE

La liberté

Jessica Polar

On a tous une conception bien personnelle de ce qu’est la liberté. Pour certaines personnes, ce sera un compte de banque bien rempli, pour d’autres, c’est d’avoir un toit sur la tête, et pour certains, c’est de se sentir bien tout simplement. Mais s’il y a une chose que la majorité des gens voit en commun dans ce sentiment, c’est d’être loin du stress.

Hier, je rencontrais mon entraîneure pour un suivi suite à ma course officielle. Depuis cet événement, je n’ai plus de programme, plus de marche à suivre, plus de plan. Et un léger vertige… Pas physique mais bien mental. Je me sens en déséquilibre car depuis plus de neuf mois, je suis à la lettre le programme conçu pour moi. J’adopte sans réfléchir les instructions, les durées et les vitesses mises dans des petites cases, sans trop broncher, sans trop regarder plus loin que la journée présente.

Et ce temps de pause me fait du bien mais m’effraie un peu aussi. La course fait maintenant partie de mon quotidien, de ma routine, de ma vie. C’est mon équilibre, mon échappatoire, ma soupape. C’est ce qui m’enracine et me libère de mes tracas, m’aide à réfléchir et à me détacher de ce qui n’est pas si important.

Et en discutant avec ma coach hier, j’ai compris qu’il n’y a pas de plan strict à l’horaire cet été. En fait, pour les prochains deux mois, j’y vais à mon rythme, selon mes envies, selon la température, selon l’endroit où je me trouve et les pistes à proximité. Je suis ambivalente devant ce vide puisqu’il m’offre une liberté euphorisante mais aussi un petit tournis. Celui de l’inconnu, celui de la crainte de perdre mes acquis, celui de l’insécurité latente qui me suit depuis mon jeune âge.

Mais je sais au fond de moi que j’ai maintenant les outils pour le gérer. Et j’ai réalisé à quel point la course, au-delà des bienfaits corporels, m’a apporté une nouvelle confiance en moi et en mes capacités, mentales et physiques. Une nouvelle liberté en fait… Et ça, ça me propulse, ça m’encourage et me motive à croire en moi et en mon aptitude à « gérer » mon entraînement estival.

Autre source de motivation dans ma vie : je rencontre plein de gens qui changent de carrière ou qui se lancent dans le démarrage de leur entreprise et désirent me faire part de leur projet. Je suis toujours très touchée par ce partage et cette confiance que l’on m’accorde car je sais à quel point ce peut être intimidant de dévoiler son bébé. Et c’est extrêmement stimulant d’accueillir le projet d’entreprise des autres, de ressentir cette belle énergie qui s’en dégage, de voir les yeux qui brillent et le sourire révélateur d’une source profonde de bien-être.

J’adore participer à ces échanges nourrissants car je crois qu’on doit collaborer du mieux de notre être à faire évoluer notre société et pour moi les entrepreneurs sont une des sources les plus florissantes de cette évolution. Sans nouveau projet, la société stagne, rien ne bouge. Le mouvement, c’est la vie, c’est ce qui améliore le monde. Et donner de mon temps dans ce type de circonstance est un réel plaisir et un honneur.

J’ai toujours été ce genre de personne qui donne beaucoup, malgré parfois des abus. Mais jamais je ne cesserai de le faire pour quelques mauvaises personnes dans le lot. Je compense avec les gentils pour effacer de ma tête les méchants. C’est drôle à dire mais c’est ainsi… De toute façon, j’ai pour mon dire que ce sont ceux qui abusent qui perdent le plus en affadissant leur âme.

Je terminerai sur cette phrase que j’ai toujours bien aimé et qui, à mes yeux, a un fort lien avec ce que c’est que la liberté, au plan humain :

On s’enrichit de ce que l’on donne, on s’appauvrit de ce que l’on prend (Werber)

Photo : Unsplash | Jessica Polar

Accepter sa différence

Joshua K. Jackson

Je ne sais pas si vous avez vu passer sur vos réseaux sociaux la vidéo de deux mères qui présentent un peu cruellement la réalité des maillots de bain « tendance » qui ne répondent pas du tout aux besoins réels des femmes d’aujourd’hui. Pour celles et ceux qui ne l’ont pas vu, la vidéo a même été traduite par l’équipe du Huffington Post.

Outre l’aspect hilarant de cette présentation on ne peut plus satirique, il s’y trouve une réalité cachée derrière cet humour caustique : la mode ne reflète pas la vraie vie. Et je le dis car on a parfois tendance à l’oublier, à tenter en vain de se mouler dans des vêtements incommodants, à endurer des journées d’inconfort total, à se sentir désabusée de ne pas correspondre à ces standards irréalistes.

Entre la théorie du discours « tous les corps sont beaux », « acceptons-nous tel que nous sommes », « aimez-moi comme je suis sinon basta », il y a la dure réalité… Le corps change en vieillissant mais ce qu’on nous présente constamment dans les publicités et les magazines, ce sont souvent des corps de jeunes filles, mineures, qui ont peu de formes et donc qui sont très loin du corps de la maman de 3 enfants.

C’est pourquoi cette vidéo est si drôle : parce que ce sont de vraies femmes, dans la vraie vie, avec de vrais corps et une vraie routine qui ne permet pas de porter un maillot de bain qui semble tout droit sorti du monde de Barbie. Mais chaque année il s’en vend des millions quand même, et chaque année, des femmes se rendront malades en tentant des régimes drastiques et malsains pour avoir un corps acceptable (dans leur esprit) dans ce maillot insignifiant.

Je me souviens de cette campagne de Dove qui prônait l’acceptation de tous les corps, peu importe leur forme et leur taille et ça avait fonctionné… un temps. Le problème c’est que pour une campagne de la sorte, il y a 5 000 publicités inverses… Alors ça se perd dans la masse, ça tombe dans l’oubli et on revient avec ce malaise constant et ce sentiment de ne pas être dans la norme… Comme cette autre campagne de la même marque intitulée « Real Beauty Sketches », qui présentait le croquis d’une femme telle qu’elle se décrivait à l’aveugle à un dessinateur professionnel versus celui décrit par une autre personne. Constat très troublant…

C’est triste car, même si en vieillissant on comprend le décalage entre le « modèle » et le vrai, on est tout de même influencée et surtout bombardée par ces publicités. À moins de vivre dans une caverne, difficile de ne pas y être exposée. Et même si la nouvelle génération semble chercher moins le conformisme, il en demeure qu’au fond on veut toutes être appréciées et avoir un minimum de regard positif sur soi.

Je n’ai malheureusement aucune solution à vous proposer et s’il en existait une, je suis convaincue que plusieurs organismes se seraient précipités pour en faire la promotion. On a avancé un peu, quand même, et certaines marques décident de ne plus utiliser des corps amaigris pour présenter leur collection ou vendre leurs produits. Mais c’est minoritaire dans la masse globale des images qui circulent.

Je nous souhaite, en fait, que ça vienne de l’intérieur, qu’au fond de nous, on intègre ce principe que notre corps est beau et que le fait d’être là, en vie, en santé, est en soi une célébration. Que même si on a plus de formes ou de plis que la voisine, ça ne nous rend pas moins belle ni moins bonne.

On accepte la divergence d’opinions alors acceptons la divergence corporelle, la diversité physique, le style personnel, la mode individuelle. Soyons fières de nous, mesdames, soyons ouvertes d’esprit et accueillantes de la différence. Ça doit partir de nous, de notre relation avec notre propre corps, de notre estime et de notre acceptation de soi. Je suis convaincue qu’ensemble, on peut amorcer ce changement nécessaire.

 

Photo : Unsplash | Joshua K. Jackson