La solitude assumée

Alex Lehner

Ce matin, dans la Presse, Mario Girard fait état de la situation des ménages au Québec où l’on bat un record de personnes vivant seules. En effet, Statistiques Canada a dévoilé hier ces données surprenantes, en quelque sorte. Dans ce nouveau rapport, on y apprend que 28% des ménages canadiens sont composés d’une seule personne et au Québec, ça monte à 33%. Cela démontre bien sûr le nombre de séparation qui grandit à vue d’œil.

Il faut toutefois voir au-delà des chiffres et comprendre que le style de vie a changé selon moi. Ce n’est plus tout le monde qui veut vivre avec quelqu’un, qui veut partager son quotidien. Et, on va se le dire, certaines personnes vivent ensemble pour une question financière uniquement et quand on atteint une certaine indépendance financière, on peut faire le choix de vivre seul.

Le journaliste pose la question si vivre seul est devenu le dernier des grands luxes et je crois qu’il y a matière à réflexion. La solitude ne signifie plus l’isolement comme ce l’était auparavant et beaucoup de gens ont un réseau fort et enrichissant qui leur permet de vivre de manière épanouie. Et personnellement, je peux vous confirmer qu’on peut très bien être heureux sans partager son quotidien avec quelqu’un.

Un des aspects intéressants du fait de vivre en solo, c’est d’avoir du temps pour soi, pour se questionner, pour s’enraciner, pour se déposer. Car il me parait évident qu’on est sur-stimulé aujourd’hui et les moments de calme et de paix se font de plus en plus rares. Je considère donc comme une richesse ces moments de solitude choisie, comme des zones de ressourcement et d’approfondissement de soi.

Bien entendu, pour certains, la solitude est subie et non choisie et dans ce cas, ça peut être souffrant et troublant mais j’ai toujours cru qu’il faut d’abord arriver à être bien avec soi pour être en mesure d’apprécier la présence de l’autre. Les bibittes internes peuvent parfois agir comme un voile sur le bonheur et en prenant le temps de régler ces troubles, on s’offre la chance de vivre pleinement heureux.

Mario Girard relate un extrait d’une entrevue que Lizette Gervais a fait en 1978, à la radio de Radio-Canada, avec Pierre Bourgault. Ce dernier s’est exprimé sur la solitude, un état qu’il a bien connu.

Dans cette entrevue, disponible sur le web, il répond à la question suivante : « Qu’avez-vous appris à vivre seul ? »

Le sage qu’il a toujours été dit ceci : « Je me suis appris moi-même. »

Et je crois que tout est là : apprendre sur soi, s’enrichir, se bonifier tel un bon vin. Oui, ça demande une dose de courage car les idées sombres reviennent plus vite quand personne n’est à nos côtés pour les chasser mais cette audace est grandement récompensée quand on arrive à solidifier notre sentiment de liberté.

Je ne fais pas ici l’apologie de la solitude et je ne vous ferai pas croire que je désire passer le reste de ma vie seule mais j’aimerais que la société accepte plus aisément ce statut et cesse de juger constamment. Le regard des gens est parfois lourd et c’est dommage car je crois profondément qu’il faut toute sorte de monde pour faire un monde.

Plusieurs concepts de la vie plus classique tombent avec la modernisation de nos styles et vie et j’espère sincèrement que le modèle de vie de couple évoluera lui aussi. Parce qu’au fond, l’important, c’est d’être heureux, n’est-ce pas ?

 

Photo : Unsplash | Alex Lehner

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