Éloge de la lenteur

Luca Ambrosi

Hier, j’ai fait la course qui m’a semblé la plus difficile depuis plusieurs mois, c’est-à-dire la plus lente. En effet, ma coach m’a expliqué que je suis dans un cycle de récupération et que mes courses seront très différentes pour les prochaines semaines. Comme n’importe quelle machine, le corps ne peut pas rouler à une cadence intense constamment, il a besoin de période de ralentissement. Avec l’automne qui s’installe, j’avoue ne pas être triste de ce programme.

Mais en partant faire la tortue hier, j’ai réalisé à quel point c’est plus demandant de se ralentir que de se pousser à accélérer. Je suis si habituée à devoir augmenter la cadence que de la diminuer me demande une concentration continue. Et, tout en contrôlant mon rythme, je pensais au parallèle évident que je pouvais faire avec ma vie en général.

Je suis une personne énergique, qui a de la drive comme on dit. Alors, pour moi, d’être à fond dans quelque chose, ça n’a rien d’épuisant, au contraire ça me stimule. Par contre, il y a un certain temps, j’ai dû apprendre à trouver des équivalents pour relaxer, me détendre, pour balancer le tout, trouver un juste milieu. Avoir des exutoires pour évacuer mon stress et ne pas être absorbée totalement pas les mêmes choses tout le temps.

Ça m’a pris un certain temps à comprendre cela et à trouver un équilibre qui me convenait, à moi. Pas ce qui est écrit dans les livres, pas un modèle tout fait, une recette en dix étapes faciles, non. Une routine, un éventail d’activités qui correspondaient à mon style personnel. Et maintenant que je l’ai trouvé, j’ai encore plein de choses à apprendre au sein de chaque élément de cette routine de vie.

Comme avec cet exercice tout en lenteur qui me force à me concentrer sur mon rythme cardiaque, qui m’amène à comprendre ma vitesse et sa cohérence avec les battements de mon cœur, habitué de battre à la chamade lorsque les foulées s’enchaînent. Ce fût exigeant de devoir me forcer à garder cette vitesse qui n’est pas naturelle mais réellement formateur. Et comme me l’expliquait celle qui produit mon programme, j’en bénéficierai dans ma progression.

Je suis maintenant capable de m’abandonner complètement aux plans de mon entraîneure, sans excès ni contrôle absolu. Une sorte de mélange entre la rigueur et l’écoute de soi. La fatigue, souvent plus mentale que physique, ne m’empêche plus de sortir mais je sais aussi quand mon corps ne suivra pas le tempo. Comprendre la différence entre une paresse de l’égo et un réel malaise physique…

Je n’aurais jamais cru en apprendre autant en me remettant à la course, ce sport qui peut paraître si simple pour plusieurs. Après tout, on ne fait que mettre un pied devant l’autre, ai-je déjà entendu! Mais à l’intérieur, un monde de connaissances se nourrit et grandit pour apporter une tonne de bénéfices à plusieurs niveaux.

C’est surement pour cette raison que, quand vous croisez un coureur, il a un sourire radieux au visage et dégage une énergie contagieuse. Il est empreint de passion, de fierté, d’estime et de reconnaissance envers la merveilleuse machine qu’est son corps et qui lui permet ce dépassement de soi purificateur. Faire un avec son corps, le chérir, l’écouter et le respecter, ça peut nous mener très loin!

 

Photo : Unsplash | Luca Ambrosi

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