Hier, en cette soirée de Super Bowl empreinte de frénésie, j’ai écouté Tout le monde en parle, à Radio-Canada. Je sais, c’est grave. Mais que voulez-vous, moi, le football, ça me laisse indifférente. Malgré le jugement que je vais attirer par une telle affirmation, je m’assume. Et je ne regrette absolument pas mon choix car j’ai pu voir l’entrevue réalisée avec le prix Nobel de la paix 2006 et inventeur du microcrédit, Muhammad Yunus.
Mon manque de culture m’avait privé des propos de cet économiste qui croit fermement au titre de son dernier livre, Vers une économie à trois zéros : zéro pauvreté, zéro chômage, zéro émission carbone. Grand instituteur du microcrédit, il est surnommé le « banquier des pauvres » et prône un nouveau système fondé sur l’altruisme et la générosité.
L’entendre, hier, expliquer les problèmes fondamentaux du capitalisme et s’exprimer sur sa vision de entrepreneuriat était, ma foi, rafraîchissant. Il fallait voir les autres invités présents hocher de la tête, un peu éberlués par un discours simple et éclairant. Et, je dois avouer qu’on peut difficilement le contredire quand on sait que 8 des plus grandes richesses mondiales équivalent aux avoirs de la moitié de la population de la planète… Des chiffres qui parlent et qui nous ramènent la réalité en plein visage.
Foncièrement convaincant, c’est quand il explique qu’on a fini par se faire croire qu’il est normal de travailler pour quelqu’un qui s’enrichit de nos efforts que ce non-sens nous frappe de plein fouet. Le profit est devenu le Saint Graal, comme si rien d’autre n’importait que le petit butin personnel, le montant qu’on a, individuellement, dans notre compte de banque. Mais pourtant, c’est bien au contact des autres qu’on est le plus heureux. Et si chacun garde sa richesse pour lui, on s’éloigne les uns des autres.
Mettre en commun nos forces, travailler pour faire grandir la communauté plutôt que pour s’enrichir isolément, c’est une vision beaucoup plus saine et profitable collectivement. Mais ça va à l’encontre du capitalisme dans lequel on baigne depuis bel lurette. Et, on le sait, avoir les moyens de lancer des projets d’économie sociale, ce n’est pas évident. Les banques et les subventions actuelles sont toutes axées sur le modèle de profit absolu.
L’objectif derrière une social business, c’est de créer une entreprise dans le but non pas de maximiser ses profits mais de résoudre un problème de santé publique ou d’environnement, principalement. Faire le bien en faisant profiter la société de notre savoir, notre expertise et notre volonté : qu’y a-t-il de plus louable, dites-moi?
J’ai trouvé cet homme franchement inspirant et bien que je n’aime pas vraiment les discours de gourou, je n’ai aucunement senti un endoctrinement ou une pensée fermée ou imposée. Certains diront que ça révèle un idéalisme car quand on est habitués à mesurer le succès par l’argent rapporté, ça paraît impossible de voir les choses autrement. Mais si on mesurait la réussite par l’impact et non le profit, on aurait la capacité de fonder des entreprises différentes et novatrices.
Chose certaine, c’est avec grand intérêt que je lirai son livre, ne serait-ce que pour m’informer sur ce modèle qui sort des normes établies. Petit mouton noir que je suis, j’ai l’impression que je vais m’y retrouver. J’ai toujours voulu trouver une façon de redonner ce que la société m’a offert. Peut-être trouverai-je l’inspiration de créer un nouveau modèle d’entreprise dans cet ouvrage, qui sait? À la base, je crois qu’il faut s’ouvrir et mettre de côté ses raisonnements a priori pour accueillir de nouvelles façons de voir les choses. C’est ainsi qu’on peut espérer créer, ou du moins collaborer, à un monde meilleur.
Photo : Unsplash | Jerry Kiesewetter