Montréal, dans les yeux d’une enfant…

andrew welch

Quand j’étais petite, du fin fond de ma belle région, je rêvais de la ville. Sa vie, ses possibilités, son bouillon de culture et son excentricité m’attiraient au plus haut point. J’avais envie de faire partie de cet écosystème effervescent, de sortir du commun de ma campagne, de découvrir le monde d’une nouvelle façon. Les milliers de boutique, les cafés et restaurants, les gens de toutes origines et de tout style, tout cela m’excitait d’une façon presque malsaine.

Je me souviens d’avoir lu le livre « Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée… » et d’avoir envie d’aller en Allemagne, de vivre aussi intensément et dangereusement que cette femme qui n’avait rien d’un ange ni d’un modèle. Cette audace et ce caractère frondeur m’impressionnaient  et je jalousais sa vie palpitante. Trop jeune pour comprendre que ça n’avait rien d’un conte de fée, je vivais par procuration à travers ma lecture.

J’avais la chance d’Avoir une tante, Marie, qui nous amenait, mes sœurs et moi, pendant quelques jours, à Montréal, pour découvrir de nouveaux horizons et probablement pour donner une pause à mes parents. 3 filles dans une maison, ce n’est pas de tout repos! Dès qu’on approchait de la ville, que je voyais les murs coupe-son de Laval, et surtout, que je sentais l’odeur si particulière qui chatouillait mes narine, je jubilais. Les yeux écarquillés, je savourais le moment présent, les hautes tours à logement, la densité, la vie qui grouillait de partout.

Je me souviens des appartements de Côte-des-Neiges où flottait un mélange de parfums indescriptible. Des épices à ce moment inconnues pour moi mélangées aux différents effluves des familles voisines me fascinaient. J’avais une soif de découverte et d’aventure, je voulais parcourir le monde et aller à la rencontre de toutes ces cultures.

Plus tard, c’est cette même tante généreuse qui m’a accompagné lors de la visite de mon premier logement Montréal, dans le chic quartier de Centre-sud. La jolie rue Bordeaux a été mon premier lieu de résidence dans la grande ville et je me rappelle ma première visite au Pier Import avec Marie qui m’acheta alors mon premier service de vaisselle. Je me sentais si grande, si adulte, alors que je n’étais qu’aux premiers balbutiements de ma vie.

J’ai passé environ dix ans de ma vie dans cette métropole, des années à déménager, à tenter de trouver ma place, à essayer de me faire un petit cocon où je serais bien. Et malgré ma curiosité et mon ouverture au monde, je n’y suis jamais parvenue. Il m’a fallu aller m’isoler au fin fond de Sainte-Sophie pour finalement me rapprocher de la ville, à Lorraine, pour me poser. J’ai compris après toutes ces années que le fameux principe du « tu peux sortir une fille de Mont-Laurier mais tu ne peux pas sortir Mont-Laurier de la fille » était bel et bien réel.

J’ai besoin d’espace, d’air et de nature autour de moi. Je suis née dans une campagne verdoyante, entourée de champs et la compacité de Montréal me pesait lourd, m’étouffait. J’y travaille encore aujourd’hui et chaque jour, je retrouve avec grand plaisir ma maison, mon espace, mon petit cocon à moi.

J’ai grandi, j’ai réalisé mon rêve d’enfant d’habiter la ville pour finalement réaliser que cette ville, je l’aime mais pas trop longtemps, pas trop proche, pas trop de l’intérieur.

 

Photo : Unsplash | andrew welch

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