On n’a jamais eu autant accès à la vie des autres, à leurs intérêts et leurs occupations quotidiennes. On étale nos vies sans gêne sur les réseaux sociaux, on s’échange des articles, on réagit, on s’offusque, on tient des dizaines de conversations simultanément sur diverses plateformes de communication. Et, à travers tout ça, j’ai parfois l’impression qu’on sait de moins en moins qui on est réellement.
Personnellement, j’ai pris un peu de recul et j’ai constaté que cette façon de vivre amène un réflexe de critique facile, de jugement instantané car je ne prends plus nécessairement la peine ou le temps de me mettre à la place de l’autre avant de réagir, d’être en contact réel avec les gens pour pouvoir me fier aussi au langage non verbal, au ressenti, à ce qui ne se transmet pas à travers un écran. À force de voir la vie des autres défiler devant mes yeux sous l’éclairage bleuté, je me déconnecte tranquillement des vraies personnes.
J’ai aussi constaté tristement que les commentaires sont souvent agressifs, ou du moins exagérés, sur Internet. Comme si la notion de respect avait été diluée ou même oubliée et que le fait de ne pas être physiquement en présence de l’autre amplifiait l’émotion et déshumanisait le rapport. Par contre, ce qui est encore plus dommage, c’est que ces réflexes se transposent dans la vraie vie. Le téléphone intelligent nous coupe du monde environnant et crée une bulle autour de chaque individu. On ne voit plus la personne qui est dans le besoin, celle qui a les bras chargés et qui aurait besoin de notre aide pour lui ouvrir la porte, ni la femme enceinte qui aimerait grandement avoir une place assise dans le métro.
Le respect, c’est envers soi et envers autrui. Je dis envers soi car à force de se créer un monde virtuel, on se prive de plein de belles rencontres, d’émotions et d’énergies positives, d’opportunités de vivre des moments magiques. Entrer en relation avec les autres, ça fait du bien à l’âme, ça nous nourrit et ça enrichit nos vies. Mais si on est dépossédé de tout cela au profit d’un monde irréel, c’est concrètement de notre responsabilité. On ne peut accuser personne de cela et on doit faire l’effort de s’en détacher.
Le respect envers les autres, ça peut être aussi banal que de ranger son cellulaire quand on prend un café avec quelqu’un et de ne pas réagir au quart de tour quand un message apparaît sur l’écran. L’humain face à nous est généralement plus important que ce que notre ami, chum, blonde, collègue ou parent nous partage. Pour la simple et bonne raison que cette personne est là, devant nous, à ce moment-là.
Le moment présent se vit aujourd’hui en multicouches, comme si le fait de savoir qu’autre chose se déroule ailleurs au même moment nous angoissait, de peur de ne pas vivre LE meilleur moment, de ne pas être LÀ où c’est vraiment cool à cette seconde précise. Et pourtant, avant, on le savait qu’il y avait autre chose ailleurs mais ça nous importait peu. On savourait nos relations, nos échanges, nos folies et on se disait qu’on était dont chanceux de vivre cela.
Le respect, ça va dans les deux sens et si on veut que les autres nous démontrent ce respect, on se doit de leur prouver qu’on est apte à leur donner en retour. On dit souvent qu’on ne doit pas faire aux autres ce qu’on ne voudrait pas qu’ils nous fassent. Et selon moi, ça commence par être sincère avec autrui, à faire preuve d’égard et d’empathie, d’écoute et de politesse. Et avant d’aller chercher le respect chez les autres, respectons-nous comme il se doit. Ce sera ainsi plus facile de le propager autour de nous. Car je crois sincèrement que la personne la plus respectée est celle qui inspire les autres.
Photo : Unsplash | Nathan Dumlao