Sortir du cadre

Ian Froome

C’est moi ou on se complique la vie maintenant? Je veux dire… Avant, on n’avait pas de cellulaire pour se rejoindre ni d’ordinateur. On ne se fiait pas sur des tonnes de technologies diverses pour prendre une décision ni sur une industrie pour nous dicter la façon de faire. Que ce soit en ingénierie, en agriculture ou en matière de gestion familiale, on faisait, sans trop se poser de question.

J’ai l’étrange impression qu’aujourd’hui, on attend une approbation pour tout, on sur-valide chacun de nos choix, on tâte le terrain de notre entourage avant de plonger, on ose moins. Et quand quelqu’un entreprend à sa façon, un peu dans la marge, on s’exclame. Mais pourtant, les fermiers d’autrefois savaient comment cultiver sans qu’on s’en émeuve, les gens bâtissaient des maisons et des routes sans diplôme et ça durait longtemps, les villages s’entraidaient et les gens s’appuyaient les uns sur les autres.

Je sais, certains me diront qu’on mourrait à 50 ans, que l’alimentation était peu diversifiée et que la CSST n’était pas là pour dédommager les blessés du travail. Et je ne dis pas que tout est mauvais aujourd’hui mais j’ai le sentiment qu’on se fit trop sur tout sauf notre instinct. Collectivement, on a perdu confiance en nous, dans toute cette normalisation excessive. Vous n’avez qu’à parler à des nouveaux parents angoissés qui se font bombarder de conseils et qui en perdent le nord tellement on leur donne l’impression qu’ils n’ont pas la capacité de bien faire.

Ou encore, quand quelqu’un dit qu’il part faire le tour du monde, tout le monde panique. On entend mille et unes histoires d’horreur (qui, soit dit en passant, arrivaient autant avant mais il n’y avait pas Internet, Facebook et les nouvelles en continu pour nous en faire part à profusion), on met en garde et on procure au voyageur une panoplie de gadgets censés protéger de tout. Au même titre que quelqu’un qui s’achète un chalet délabré pour le retaper se voit recevoir quantité de réprimandes sur les risques de se faire avoir.

Mais, ce qu’on oublie, c’est que c’est en essayant des affaires qu’on apprend, tout comme les enfants doivent tomber pour intégrer la notion de faire attention. On surprotège au point que les générations ne savent plus si elles peuvent se faire confiance. J’ai souvenir de mon enfance empreinte d’insouciance où, loin d’être chaperonnées, ma sœur et moi partions « à l’aventure » dans la forêt toute la journée. On faisait un feu, on construisait une cabane. Il aurait pu nous arriver bien des malheurs mais rien de tout cela n’est survenu. On a plutôt acquis une débrouillardise et un amour de la nature à la place.

Je crois qu’il y a du bon dans notre monde d’aujourd’hui mais j’ai aussi l’impression qu’on doit se donner du « lousse » un peu… À trop vouloir cadrer, normaliser, standardiser, prémunir et prévenir, on ne prend plus de risque et on ne se laisse plus surprendre. La spontanéité apporte pourtant son lot de belles surprises et de découvertes inattendues! Et, entre vous et moi, ça fait tellement du bien de sortir des sentiers balisés des fois…

Personnellement, je tente de me laisser stupéfier par la vie et de ne pas trop m’enliser dans la routine endormante. Le fait d’être consultante colle bien à cette philosophie mais aussi, quand une invitation impromptue survient, que je tombe sur une annonce d’un spectacle qui m’intéresse ou qu’une opportunité de sortir de ma zone de confort se présente, je ne réfléchis pas trop longtemps et je fonce. Je me dis que la vie met sur ma route ce qui se doit d’arriver et qu’au pire, j’apprendrai de cette erreur. Se faire confiance, s’écouter et vivre sa vie comme on l’entend, c’est une façon de vivre que je tente d’appliquer au quotidien et, jusqu’à maintenant, ça semble pas trop mal, je dois avouer 🙂

 

Photo : Unsplash | Ian Froome

Related Posts

Matthew Kane Notre corps, notre messager… 18 mai 2016
Daiga Ellaby Un devoir d’automne 12 septembre 2019