Hier, gros test avant mon départ pour les chemins de Compostelle : une longue rando avec mon gros sac-à-dos, bien rempli (et bien lourd). Le destin a fait qu’en arrivant au parc régional, un gros orage faisait rage. J’ai pris la sage décision d’attendre un peu, question de ne pas partir trempée et d’éviter qu’un éclair vienne bousiller ma vie… Il y a la volonté et l’entêtement malsain!
Alors, une fois le pire passé, j’ai enfilé mon imperméable et mon sac et je suis partie, bâtons de marche en main et sourire aux lèvres. L’avantage, quand on part marcher sous la pluie, c’est qu’on a la sainte paix! L’odeur de terre mouillée m’a toujours procuré le même effet apaisant : je suis dans mon élément dans le bois. Alors, j’avais cette sensation de légèreté malgré le poids dans mon dos.
Je vous fais grâce des ajustements nécessaires et inconforts normaux d’un nouveau sac. Ce qui ressort de mon expérience, c’est qu’on n’a pas le choix d’être attentif à notre corps quand on entreprend ce type d’aventure. Si on ne l’écoute pas, croyez-moi, il criera plus fort! Chaque petit irritant, chaque débalancement ou position décentrée fera en sorte que les muscles forceront incorrectement. C’est instantané : il suffit d’un centimètre de trop sur un bord pour que ça coince…
Mais ça m’a aussi amené à réfléchir sur la vie, sur notre façon de vouloir tout contrôler et tout prendre pour acquis. Pourtant, tout évolue. En marchant, mon corps change et s’adapte et je dois constamment me réajuster. Tout comme dans la vie. Rien n’est systématiquement fixe, et heureusement. On doit constamment s’accorder, tel un instrument de musique. Sinon, la vie serait banale et morne…
J’ai aussi pris conscience de notre tendance à supposer, à interpréter et à se faire des scénarios. On aimerait tellement se sécuriser en connaissant le futur qu’on perd une énergie folle à tenter de savoir comment ça se passera. Mais rien ni personne ne peut connaître le futur, il faut accepter ce fait et se concentrer sur le présent. Tout comme le mauvais réflexe d’émettre des suppositions basées sur nos croyances et perceptions au lieu d’attendre les explications et les faits. On se fatigue énormément en cherchant à traduire constamment au lieu de simplement accepter telles quelles les choses qui arrivent.
Quand on attaque une longue randonnée, certains éléments sont essentiels : on doit faire avec le corps qu’on a et l’état dans lequel on est. On doit se concentrer sur sa respiration et demeurer à l’écoute de soi pour s’adapter. Et on doit se préparer mentalement à vivre des imprévus. Le reste, la vie s’en chargera. Et on devrait, en fait, agir ainsi dans tout. Mais quand on est dans notre zone de confort, l’ego veut tellement y rester qu’il fait tout pour nous y garder.
J’apprends beaucoup de mes essais et entraînements des dernières semaines car je n’ai d’autres choix que d’être dans l’acceptation et la constatation. Même si j’avais voulu en faire plus, je n’aurais jamais pu être prête à toutes éventualités. Car rien ne peut être entièrement planifié à la perfection et, faire face à la musique, ça fait aussi partie de l’expérience. Je réalise tranquillement que j’ai tendance à vouloir palier à tout mais que peu importe mes efforts, il demeurera toujours une part d’inconnu.
Dans deux semaines, je serai dans un avion pour Madrid avec le cœur rempli d’espoir, d’euphorie, un brin de stress et surtout, l’envie folle de découvrir le monde, un pas à la fois. Il est impossible de prévoir ce que ce voyage aura comme effet mais la simple préparation m’apporte déjà beaucoup, sans même avoir quitté mon petit cocon. Ça aussi, ça fait partie du chemin alors je n’ose croire ce qui restera imprégné en moi, une fois tous ces kilomètres parcourus. Mais ça, je le verrai en temps et lieu…
Photo : Unsplash | Austin Ban