L’art de trop penser

Nikita Kachanovsky

En lisant ce titre, vous vous êtes peut-être demandé si j’étais tombée sur la tête (grâce à nos belles patinoires dans nos rues, ça aurait pu). Mais ce titre, un brin sarcastique, se veut une constatation à la suite de nombreuses réflexions qui ont trottées dans ma tête durant les derniers mois. C’est que j’ai un hamster mental assez hyperactif merci, voyez-vous? Il s’en donne à cœur joie, même quand je ne m’en rends pas compte.

Hypervigilant, mon hamster se questionne constamment. C’est un sacré avantage dans mon boulot d’analyste mais ça l’est un peu moins quand on tente de se vider la tête… En bref, j’ai plusieurs tracks mentales qui fonctionnent en même temps : je peux me chercher un stationnement, penser à prendre un rendez-vous, juger la tenue vestimentaire d’un passant, me demander si ma dernière réunion a été efficace, réfléchir à un problème dans mon travail, chercher une solution à un truc personnel, faire la liste de courses et me demander où j’irai pour mes prochaines vacances.

Rien de nouveau sous le soleil me direz-vous? Je sais, je suis loin d’être la seule et c’est d’ailleurs ce qui me préoccupe. On est stimulé en permanence ce qui fait qu’on pense en permanence et selon moi, on pense trop. J’ai l’impression qu’on s’épuise à laisser toutes ces pensées occuper de la place dans notre esprit constamment. Il suffit d’essayer de méditer pour comprendre qu’on peine à faire le vide.

C’est un sacré exercice de tâcher de mettre sur pause ce flot incessant d’idées. On y parvient par parcelle, par secondes grappillées ici et là mais à quand remonte votre réel moment de vide, de paix, d’apaisement? Personnellement, je réalise que ça se fait rare. Non pas que je ne le veux pas mais la liste de choses à faire qui s’allonge prend souvent le dessus.

Je sais pertinemment que je dois privilégier ma santé mentale et que je ne sauve pas des vies. Je le répète à mes équipes de travail pour dédramatiser les situations à chaque semaine. Mais dans ma vie personnelle, j’ai tendance à vouloir régler immédiatement les choses. Pourquoi remettre à demain ce qu’on peut régler aujourd’hui, hein?

Trop penser ou se laisser envahir par des pensées inutiles, là est la question! Ce n’est pas réellement une question, j’en conviens car je l’écris en pleine conscience. Je sais que je me laisse polluer l’esprit de futilités et que je peux volontairement écarter les jugements et les commentaires inutiles. Mais c’est plus facile à écrire qu’à faire, on le sait bien.

Mon meilleur truc pour me déconnecter du bourdonnement extérieur, c’est la musique. Me plonger dans une ambiance musicale et laisser mon esprit s’apaiser au rythme feutré d’Alexandra Streliski, par exemple, est une technique toujours gagnante. Et je devrais y avoir recours plus fréquemment. Expérimentée dans le métro hier, alors que des jeunes femmes papotaient bruyamment au sujet de leurs dernières conquêtes, cette façon de me détacher me fait un bien fou.

Alors ce titre ironique, c’est plutôt un appel à l’art de tirer la plug. Si, chaque jour, on prend quelques minutes pour soi uniquement, pour se faire plaisir, pour s’écouter, pour sentir notre corps, déceler nos tensions et nos sensations, j’ai la nette impression que ça ne peut que nous aider. Personnellement, j’ai envie de le faire plus souvent, puisqu’à chaque fois, j’en ressens les bienfaits.

Et vous savez quoi? Le pire qui va m’arriver, c’est de manquer un bout de conversation. Et personne ne mourra de devoir répéter une phrase si mon moment de divagation survient alors qu’on sollicite mon avis. Se choisir, c’est aussi décider de la quantité d’informations qu’on laisse entrer dans sa tête. On n’a pas à être disponible 24/7, on peut laisser notre cellulaire fermé et c’est correct de refuser de faire 12 tâches en parallèle. Nous ne sommes pas des robots. Être humain, c’est aussi être imparfait.

Photo : Unsplash | Nikita Kachanovsky

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