L’esprit libre

Annie Spratt

Quand j’ai commencé à courir (sérieusement) il y a de cela plusieurs semaines, je faisais part à mon entraineuse de ma crainte face à l’hiver, face au froid et à ma tolérance. En d’autres termes, j’avais la chienne… Et comme je n’ai jamais réellement aimé cette saison froide, j’avais doublement peur de ma réaction.

Hier, avec une petite neige qui tombait tout doucement, j’ai attaqué ma course, sans trop me poser de questions. Et à ma grande surprise, j’ai adoré ! J’en étais même à me dire que je préfère le froid que la chaleur de l’été qui écrase et épuise rapidement. Je me suis amusée, j’ai respecté mon rythme, et surtout j’ai couru avec le sourire.

De retour chez-moi, fière et gonflée à bloc, j’ai réalisé encore une fois à quel point notre mental peut nous empêcher d’avancer parfois et que si on s’arrête trop à penser, on peut très bien passer à côté de belles expériences. La peur de l’échec ou du jugement est tellement présente aujourd’hui que même seule avec soi-même, ça nous pollue la vie.

Car je me disais : même si c’est difficile, même si ça demande une adaptation avec la neige, la glace, le vent, le froid et le nez qui coule, que peut-il réellement m’arriver ? Je veux dire, à part être plus lente, il n’y aura pas mort d’homme !

La quête de la performance est si profondément ancrée dans nos vies qu’on ne se rend même plus compte que ça nous bloque. Et je parle d’un « on » inclusif ici. Et je parle au « on » car je sais pertinemment que je ne suis pas seule dans cette situation. On a tous des petits moments de craintes où on se dit : qu’est-ce que les gens vont penser ? Ou bien : est-ce que je vais avoir l’air fou ?

C’est terrible de penser qu’on s’en remet souvent à l’image plutôt qu’au sentiment réel que l’on ressent. Je réalise plus que jamais qu’on se prive de belles sensations et d’apprentissages riches de peur de paraître faible ou inadéquat dans le cadre Instagram parfait de la vie. La peur de l’échec est réellement présente et castrante. L’échec est vu comme négatif. Et pourtant, on a une tonne d’exemples de gens qui se sont royalement plantés dans leurs projets et qui aujourd’hui nous disent que c’est l’une des plus belles choses qui leur soit arrivées car ils ont appris de cela plus que dans bien des réussites.

Alors pourquoi est-on encore si porté à croire que si ça ne fonctionne pas comme prévu, on est nul ? Pourquoi a-t-on encore l’impression que seul le succès est louable et que l’excellence est la seule option ? Pourquoi le plaisir n’est-il que rarement un critère dans nos choix ? C’est presque rendu que même faire l’épicerie doit être efficace et chic…

Je ne sais pas si c’est le fait d’avoir pris une pause qui m’amène à nous observer de manière plus critique mais j’ai l’impression que l’on s’use plus rapidement à force de trop vouloir la perfection à tout prix. Au détriment de notre santé, mentale et physique…

J’espère que, malgré mon retour au travail lundi, je saurai garder cet état de détachement face aux exigences de performance et que le plaisir sera un élément de décision plus prioritaire. En fait, moins me poser de question et laisser mon instinct me guider a souvent été ma meilleure stratégie.

Et je vous le souhaite aussi car on se sent plus détendu et moins oppressé quand on s’écoute sincèrement et qu’on cesse de tenter de correspondre au modèle. Être soi et garder son esprit libre, c’est d’ailleurs le plus beau cadeau que l’on peut s’offrir et ce n’est pas nuisible sur notre budget 😉

 

Photo : Unsplash | Annie Spratt

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