Je ne sais pas pour vous, mais moi j’accorde beaucoup d’importance aux regards des gens. Leurs yeux sont le reflet de leur âme et de leur cœur et on peut y lire la vérité, au-delà des paroles et des gestes. Quand je rencontre des gens pour la première fois, je porte une attention particulièrement à leur façon de regarder et à leur capacité de fixer leur regard dans celui de leur interlocuteur.
Que ce soit des clients ou de simples rencontres personnelles, je suis toujours fascinée quand je tombe sur quelqu’un qui a l’œil fuyant. Quand une telle situation survient, je m’attarde encore plus sur ce trait de personnalité car je tente de comprendre pourquoi. Est-ce une timidité, un malaise dans la situation ou simplement le fait que cette personne n’est jamais en pleine confiance, en pleine possession de ses moyens. Souvent, se sentir intimidé par la personne à qui l’on parle peut avoir un effet négatif sur notre attitude et notre assurance.
Je ne crois pas m’être déjà retrouvée dans une situation où j’étais incapable de regarder les gens. J’ai cette chance d’avoir une aisance en public et j’arrive à observer les gens à qui je m’adresse et à déceler leur position face à mes propos selon leurs réactions physiques. J’ai débuté ma carrière dans l’enseignement et je me souviens que je pouvais, par moment, lire la confusion dans les yeux de mes étudiants alors je reprenais du début, usant de métaphores et d’histoires parfois loufoques pour faire entrer la matière.
Dans l’intimité, je suis particulièrement sensible à cette capacité. Un regard franc me séduira plus qu’une esthétique parfaite. Je n’aime pas que quelqu’un me parle ou m’embrasse sans jamais être capable de me regarder droit dans les yeux. Peut-être que certaines personnes me trouveront exigeantes mais j’ai besoin de lire dans le regard, c’est ainsi. Et d’aussi loin que je me souvienne, ça l’a toujours été.
J’ai rencontré quelqu’un ce week-end qui a cette même habitude, ce même comportement et c’est assez fascinant quand on trouve ainsi son miroir. Je n’ai pas besoin de vous dire qu’on avait presque les yeux secs à force de se regarder. Mais j’ai l’impression de connaître plus cette personne grâce à cela, plus que certains autres rendez-vous que j’ai eu où il n’y avait pas cette connexion.
Comme le chantait Gerry Boulet, je suis sensible à l’invisible. Car peu importe les mots employés, la posture, les gestes et les promesses, les yeux eux ne pourront jamais berner. On le sent, on le voit quand les paroles ne sont pas ressenties profondément, quand le cerveau tente une manœuvre de diversion. Ça transparait dans le regard, ça perce dans l’iris. À la longue, on finit par pouvoir comprendre ce niveau de communication incontrôlable.
Voir la souffrance, voir l’amour, voir la peine, voir la gêne, voir tous ces sentiments qui sont parfois impossibles à nommer, c’est très touchant. C’est une porte sur un monde sans mots, sans voiles et sans filtres. On ne masque pas ce qu’on ressent dans ses yeux, sauf si on tourne la tête. Et encore…
J’aime les yeux, j’aime le regard, j’aime pouvoir lire et écouter au-delà de la voix. Et je donne en retour la même sincérité, la même fenêtre sur mon âme. Car je crois que c’est ainsi qu’on se lie sincèrement aux gens, qu’on se permet de vérifier si nos esprits peuvent s’entendre, si nos âmes peuvent se plaire. Et je terminerai avec la finale de Gerry :
Dans les yeux des mal-aimés
J’ai vu le soleil briller
Et j’ai laissé mon cœur parler
Photo : Unsplash | Remy_Loz