Car c’est le plaisir qui importe…

Agnieszka Boeske

Récemment, quelqu’un m’a dit que je faisais beaucoup de sacrifices dans ma vie. J’ai trouvé ça vraiment étrange de me faire dire cela et c’est resté gravé dans ma tête, roulant en boucle avec cette impression que je ne suis pourtant pas dans le champ. Et, en faisant un tour rapide sur mes réseaux sociaux et sur certains blogues que je suis, ça m’est apparu soudain clairement : aujourd’hui, on veut tout, tout de suite et sans effort.

Quand je repense à mon enfance où les voisins possédaient une ferme et travaillaient d’arrache-pied pour survivre, je me souviens qu’ils commençaient leur journée très tôt et terminaient très tard. J’ai aussi en mémoire les efforts assez intenses qu’exigeait l’entretien de notre immense potager. Partir les semis dans la maison, préparer le terrain au début de la saison, ajouter le compost, sarcler, aérer, préparer les rangs, semer et constamment enlever les mauvaises herbes qui tentaient d’envahir la zone… Tout cela faisait partie de nos activités estivales.

Tout comme à l’école, quand on voulait réussir et qu’il fallait donner son 110%, étudier, réviser, réécrire ses notes et relire ses manuels, on doit, dans la vie, y mettre du sien pour récolter les fruits de nos efforts. S’appliquer dans ce qu’on fait a toujours eu des effets positifs, si tant bien qu’on s’applique dans les bonnes choses. S’investir dans du négatif génère rarement du bon, on s’entend…

Alors quand on me dit que je fais des sacrifices, je souris. Oui, je me donne à fond, comme je l’ai toujours fait mais parce que je sais pertinemment que ça en vaut la peine, j’en ai des preuves, j’ai expérimenté tout au long de ma vie ce processus. Si, à force de piocher, je n’avais vécu que des échecs et des déceptions, je ne tiendrais pas le même discours aujourd’hui.

Bien entendu, j’ai de l’énergie à revendre et j’ai une personnalité assez intense, ce qui fait que quand je m’embarque dans quelque chose, j’y vais entièrement, de tout mon être. C’est peut-être ça, au fond, qui détonne, qui fait peur ou qui surprend. Mais je suis qui je suis et je ne changerai pas. Je préfère de loin ma fougue à une lassitude constante.

Avant, quand j’étais rongée par l’angoisse et l’anxiété, chaque pas me faisait frémir, j’étais constamment dans le doute et la crainte de faire le mauvais choix. Parce qu’à mes yeux, l’erreur représentait un échec destructeur. Dans ma tête, je perdais ma légitimité si je me trompais, si je m’égarais. Je sais, ça peut paraître absurde écrit comme cela mais la fragilité mentale a bien peu de logique.

Maintenant, je sais que je ne serai pas moins pertinente si je me goure ou si j’ai tort. Je dois seulement avoir l’humilité de l’avouer, de l’admettre et d’ouvrir mon cœur et mon esprit à cet apprentissage. Rien n’arrive pour rien, je le répète souvent. Et, on peut payer cher de ses mauvaises options mais on apprendra beaucoup et on évitera des situations similaires.

Parfois, j’ai l’impression de ramer dans le vide, de ne pas avancer, que mon dévouement n’apporte rien. Mais, avec la course et les entraînements parfois pénibles, j’ai compris que j’investis dans le futur, même s’il est lointain et me parait inaccessible. En mon for intérieur, je sais, je sens. Je me rappelle d’où je suis partie, je me rappelle ma progression, je me remémore les débuts et je constate les accomplissements et les résultats.

Aujourd’hui, on aimerait avoir tout cuit dans le bec mais on se priverait du meilleur : de la connaissance et du vécu qui viennent avec les efforts et les sacrifices. C’est pourtant ce chemin qui prime sur la récompense finale. C’est dans ce parcours que notre vie se vit, pas dans la seconde où on récolte. Alors, oui, je continuerai de m’amuser dans mes aventures, même si je tombe et même si je me trompe. Parce qu’au bout du compte, c’est le plaisir que j’ai à essayer qui m’importe.

 

Photo : Unsplash | Agnieszka Boeske