Oser être soi

gabrielle cole

Ça y est, c’est fait. Je suis passée de blonde bohème à rousse audacieuse (on dirait des totems scouts). Ma nuque dégagée et mon teint de rouquine ressortent maintenant, mon regard a changé, j’ai l’air plus tanante, plus espiègle. Le contraste physique est marquant mais celui à l’intérieur de ma tête l’est encore plus. J’ai osé, j’ai franchi le cap de la peur et je suis sortie du lot. Et je me sens libre…

C’est drôle car lorsque l’on annonce qu’on envisage un changement, disons, drastique, les gens projettent sur nous leurs propres craintes et freins. Ça n’a rien de méchant ni de désagréable, surtout quand on comprend le processus mental qui est derrière cela. C’est humain, c’est émotif. On veut toujours protéger, soi-même et les autres, des critiques ou des jugements alors c’est plus facile de choisir le statu quo. Donc, quand on s’expose, qu’on choisit consciemment de faire un bond en dehors de la zone de confort, ça déstabilise tout le monde, même ceux qui ne sont pas concernés.

Ça m’a rappelé quand j’ai quitté ma belle job sécurisante et glorifiante : certains m’ont félicité, d’autres m’ont bombardé de remontrances. Étais-je seulement consciente de la chance que j’avais d’occuper un tel poste? Serais-je une enfant gâtée qui n’est pas capable d’apprécier ce qu’elle a? Et bien non, je ne suis ni conne, ni inconsciente. Je suis moi, et non toi, toi ou toi. Je suis ce type de personnalité qui a besoin d’air nouveau, de me plonger dans de nouvelles aventures pour me sentir vivante, ou de changer de tête pour me donner un nouvel élan.

L’être humain est ainsi fait, il tend à chercher la paix et à fuir les provocations, en général. Quand on brasse un peu la poussière, ça fait remonter toute sorte de choses. Mais il faut l’aimer ainsi et ne pas se laisser freiner ou affecter par les réactions. Quand on sait que ça parle des autres et non de soi, on arrive à se détacher, à sourire, à se connecter à soi et à se dire que si on le sent à l’intérieur de nous, c’est donc la bonne chose à faire, peu importe l’effet que ça provoque.

C’est comme certains sujets qui rendent les autres inconfortables. Ces temps-ci, je travaille sur mon testament car je n’ai malheureusement pas réglé ce dossier malgré qu’il soit sur ma liste de choses à faire depuis longtemps. Je ne suis pas une grande procrastinatrice mais il y a de ces sujets qui m’emballent moins. Et quand j’aborde celui-ci avec des proches, je sens leur malaise, leur désir de couper court, de faire vite, de passer à autres choses.

Pourtant, c’est primordial de mettre en ordre ce que nous laissons derrière nous et comment on veut que ce soit géré. Car on ne sera plus là! Et c’est cette notion, cette prise de conscience qui choque, qui bouleverse, qui incommode. J’ai pour mon dire qu’il vaut mieux prévenir que guérir (surtout que dans ce cas-ci, on ne pourra pas guérir soi-même). On ne peut pas se mettre la tête dans le sable, car s’il y a bien une certitude, c’est que nous quitterons ce monde un jour…

Mais pour le moment, je suis bien vivante, différente certes, méconnaissable selon certains, mais je suis bien moi, plus que jamais en fait. J’ai le sentiment d’être moins madame-tout-le-monde, moins dans le moule, moins comme la masse. Et ça crée chez-moi une émotion agréable, mélange de zénitude et d’euphorie. Une décision bien mûrie et bien assumée, ça fait souvent cet effet…

Il faut s’amuser dans la vie, faire ce dont on a envie, ne pas remettre constamment à plus tard ce qui nous tente car on ne sait jamais ce que demain sera et même s’il existera. Ça n’a rien de triste ou de déprimant, ce devrait être en fait notre état d’esprit permanent, notre base pour prendre toute décision. Il ne faut rien prendre pour acquis, être reconnaissante de ce qu’on a et oser. Le seul risque est de découvrir une nouvelle facette de soi… 

 

Photo : Unsplash | gabrielle cole

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