La vie, la vraie

Marc Kleen

Dernièrement, j’ai fait un sacré ménage dans mon Facebook, du point de vue des pages et des marques que je suivais. J’avais cette impression d’être envahie par des promotions au dépend des publications de mon entourage. Alors j’ai fait table rase (ou presque) et je suis repartie à zéro. C’est que, voyez-vous, en une dizaine d’années, on peut en liker des affaires non pertinentes! Et, au bout du compte, ça fait beaucoup de bruit pour rien…

En pratiquant cette épuration, ça m’a permis de revoir mes intérêts. Jadis, je suivais beaucoup de marques de vêtements ou des magazines mais j’ai lentement migré vers des causes plus environnementales et des activités plus sportives ou culturelles. En optant pour une transition plutôt radicale, je dois dire que le réseau social a semblé déstabilisé par ce changement de cap. Et j’aime bien cette idée de lui brasser la cage : à nous deux, algorithme infernal!

J’apprécie grandement ce nouveau mur de publications fraîchement exposées à mes yeux. Ça fait du bien de remplacer les « top 10 des tendances modes » par les destinations les plus inusitées ou les trucs zéro-déchet à adopter. Je me sens plus en phase avec mes valeurs et, malgré que j’y passe moins de temps qu’avant, Facebook demeure un outil que j’aime consulter. Les jeunes me trouveront peut-être ridicule de continuer d’utiliser ce réseau vieillissant, sachant la panoplie grandissante de plateformes qui déferle depuis longtemps (Vice, Tik Tok, IMO, Smule…). Ce doit être mon petit côté vieux jeu…

Je n’ai plus l’énergie pour diffuser et zieuter de multiples plateformes et ce temps, je préfère le mettre sur des activités plus humaines et actives. C’est d’ailleurs un peu à cela que me sert mon Facebook : découvrir de nouveaux groupes d’intérêts et des nouvelles activités à essayer. Que ce soit un atelier sur le jardinage ou ma présence dans le comité organisateur du 10 km de ma ville, le site de Mark Zuckerberg n’a pas que du mauvais. C’est dans notre manière de l’utiliser qu’il faut s’attarder.

Encore demain, il y aura surement une nouvelle bébelle numérique qui sortira de son cocon, tentant de capter l’attention tel un Pokémon go! Mais, je passerai mon chemin, trop occupée à planifier mon voyage ou mon potager, malgré la neige qui colle et la glace qui s’accroche. Chacun ses priorités me direz-vous et c’est bien ainsi. On choisit ce qu’on veut faire de notre temps et de notre énergie. Comme il m’est arrivé de m’égarer sur le Net pendant une heure sans but précis, je me garde de juger qui que ce soit qui s’y plait.

On dépense souvent trop de notre précieuse énergie sur des futilités : vouloir trop de ceci ou de cela, accorder trop d’importance à l’opinion des autres ou à notre image, tenter d’être ce qu’on attend de nous au lieu d’être soi. Mais au bout du compte, ce qui importe vraiment, c’est ce qu’on ressent lorsqu’on se regarde dans le miroir. Est-on fière de soi, d’être qui nous sommes, de devenir cet être formidable qui évolue à chaque minute? Ou avons-nous l’impression de vivre la vie d’une autre, d’être à côté de ses pompes, de ne pas se reconnaître ou de marcher sur les mains? Y a-t-il concordance entre la personne que l’on projette virtuellement et l’être vivant qui se regarde dans la glace?

Comme on dit, il n’y a pas de bonnes réponses à ces questions, mais il y a une réflexion à entamer si on ne se sent pas à l’aise, les yeux dans les yeux avec soi-même, sans le filtre Instagram ni la story en route. Vivre sa vie pour soi, sans penser aux abonnés, aux clics et aux likes, c’est presque difficile aujourd’hui. Mais, à la fin de la journée, quand on retire nos vêtements, notre maquillage, notre masque social, il reste nous. Et c’est ça qu’on doit apprendre à aimer, tout simplement.

Photo : Unsplash | Marc Kleen

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