Comme un air de déjà-vu

Jp Valery

Malgré les gros flocons qui tombent allègrement ce matin, on le sent : le printemps s’amène, lentement mais surement. Ça fera du bien au moral de tout le monde. Car depuis quelques semaines règne une ambiance morose, une écœurante aiguë comme on aime le dire. On est à bout, on manque de chaleur, de lumière, d’air pur. On veut aérer nos maisons, faire le grand ménage et sortir de notre cocon.

C’est normal, ça a commencé tôt, à la mi-novembre. Et mars se balance complètement du fait que tout est arrivé si vite dans nos vies à l’automne : il remplit son mandat de mois chaotique. On verra de tout, on chialera allègrement mais doucement, les degrés vont monter, le soleil prendra ses aises et les murs de neige fonderont sans qu’on le réalise vraiment.

Le cycle des saisons nous surprend toujours, on a inévitablement cette impression que c’est pire, qu’on n’a jamais vu autant de neige, de froid ou d’intempéries de toute sorte dans la même semaine. Et pourtant, aucun miracle n’est survenu cette année : c’est simplement l’hiver. Mais on aime croire qu’on a survécu à quelque chose d’exceptionnel, qu’on mérite de se plaindre encore un peu.

Hier, le déneigement des entrées a amené les voisins à se parler. Ça fait des mois qu’on est enfermé et qu’on se croise à peine quelques secondes de peur de restés gelés sur place. La température clémente nous a permis de prendre des nouvelles, de jaser de tout et de rien. Ça fait un bien fou d’être là à prendre son temps, à rigoler sur cette saison infernale, à se raconter nos voyages et nos plans pour l’été.

Parfois, je me dis qu’on a une chance inouïe au Québec de vivre des saisons drastiquement opposées. On ne peut jamais rien prendre pour acquis, on doit s’adapter constamment. Peut-être que cela nous aide à ne pas s’enliser dans le cynisme, à ne pas se ramollir. On doit rester vifs, toujours prêts à s’ajuster aux conditions, que ce soit le chaud ou le froid, la grisaille ou le soleil ardent. Ça fait peut-être de nous un peuple résilient.

Chose certaine, cette année, les inondations seront bien présentes avec toute cette neige qui fondera rapidement. Que je n’en vois pas un être surpris! C’est écrit dans le ciel que ce sera mouillé pendant un temps. Les pompes vont se faire aller et il va falloir creuser des rigoles pour permettre à l’eau de faire son chemin vers les égouts dans les rues. Mais tout cela permettra encore un bel esprit de collaboration et d’entraide digne de notre belle province.

Le printemps, on renaît, on sort de notre coquille, on retrouve la légèreté tant désirée. Mais, comme on dit qu’en avril on ne doit pas se découvrir d’un fil, on doit être prudent devant les élans de mars qui nous feront croire qu’on peut retirer foulard et manteau. Gare à vous, un rhume est si vite arrivé!

Le simple fait de parler du printemps me donne le sourire. Même si j’aime l’hiver, j’avoue que là, je passerais à autre chose. La glace ayant pris ses aises dans les rues depuis fort longtemps, je ne peux plus aller courir dehors et à peine marcher. J’ai besoin d’air, de bouger et d’ouvrir les fenêtres. Un simple coup d’œil à Météo média m’a suffi pour m’exciter devant ces degrés positifs!

Alors, préparez-vous, ça va débouler! On va laver les rideaux tout en préparant nos impôts, on va sortir les bottes de pluie pour aller jouer dans les trous de boue après le gros ménage du frigo, on va aérer la maison tout en continuant de chauffer un peu la nuit. Tout ce joli chaos nous apportera une nouvelle énergie, un vent de fraîcheur.

Et je vous le donne en mille : dans 3-4 mois, plusieurs se plaindront qu’il fait trop chaud, que c’est le piiiiiire été de notre vie, qu’on n’a jamais vu ça avant… Finalement, notre sport national, c’est peut-être le chialage?

Photo : Unsplash | Jp Valery