Je vous ai parlé de mon changement de look récemment. Et j’ai été particulièrement étonnée par la réaction des gens. À la suite de cette métamorphose, on m’a dit que j’avais eu du courage d’oser modifier mon allure de la sorte. Mais je ne considère pourtant pas cela comme du courage. De l’audace peut-être, mais on ne parle ici que d’apparence. Ce n’est que l’image que je projette. Je n’ai pas quitté ma vie pour rentrer chez les sœurs cloîtrées, j’ai simplement une autre tête.
Pour moi, un exemple de courage, c’est une femme qui quitte son mari violent avec ses enfants, c’est une famille qui fuit son pays en guerre pour immigrer et recommencer sa vie à zéro, c’est quelqu’un qui souffre d’un trouble envahissant mais qui monte sur scène pour partager son vécu et conscientiser les gens à la tolérance, c’est un alcoolique qui entre en cure pour se soigner malgré la douleur, c’est une femme qui dénonce son agresseur ou un ado qui révèle son homosexualité à ses parents conservateurs.
On attribue ce changement au courage car l’image occupe une place prépondérante dans nos vies ultra diffusées et partagées. Plus rien ne passe incognito et on s’oblige à partager ce qu’on vit. En démarrant ce blogue il y a quelques années, je me suis jurée de demeurer authentique et de ne jamais écrire pour plaire mais uniquement pour partager et échanger avec les gens. Réfléchir à voix haute en quelque sorte sans tomber dans le jugement.
Ces derniers temps, je me suis demandé si je n’avais pas fait le tour, si je ne commençais pas à me répéter. J’évolue, certes, et mes propos demeurent le reflet de ce que je suis mais par moment, je me dis que j’ai sans doute déjà écrit sur tel sujet ou donné mon impression sur quelque chose. En choisissant de changer mon style, j’ai aussi eu l’impression que j’avais besoin de voir autre chose, de changer mon angle de vue, de diversifier mes intérêts. Après avoir suivi des ateliers et cours divers dans les derniers mois, je n’ai pas encore trouvé l’activité avec un grand A et je me demande même si je ne suis pas simplement une nomade d’intérêts.
Chose certaine, je ne me considère pas comme courageuse car si c’était le cas, j’aurais surement déjà vendu tous mes avoirs pour parcourir le monde avec pour seul bien mon sac-à-dos. Mais je n’ose pas, trop de vertige devant tant de vide. Depuis des années, je roule à mon rythme certes, je prends des pauses quand bon me semble, je choisis mes mandats et je mets sur la table mes conditions sans gêne. Mais je ne sors pas tant du cadre que je me suis fixée, même s’il peut sembler beaucoup plus flexible que pour la majorité des gens.
Être soi, c’est aussi accepter et tolérer ses blocages, les analyser sans les juger, choisir ses batailles comme on dit. On peut décider de s’attaquer à un aspect de notre personnalité qui nous dérange mais rien ne dit qu’on doit le changer. Parfois, il faut simplement comprendre sa source pour mieux cohabiter. Être soi, c’est aussi et surtout, apprendre à s’aimer comme on est. Rêver d’être comme les autres, envier une autre vie qui nous semble parfaite ne fait que nous miner le moral. Accepter la sienne, y apporter les modifications qui sont à notre portée et cesser de se comparer me paraît une solution plus durable et saine. Le courage, c’est d’être soi, sans complexe.
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